
les réseaux sociaux transforment-ils l’image du yoga?
Depuis que j’ai décidé de me lancer dans l’aventure de créer un énième blog qui parle du yoga, je m’intéresse de plus en plus à cette grande communauté déjà existante sur l’internet. Cette observation m’amène à me poser beaucoup de questions. Car ce que je vois reflète très peu l’esprit du yoga. Evidemment comme on est dans l’image, on va privilégier l’esthétique, les couleurs, les formes, les asanas parfaits. Mais est-ce que c’est ça la pratique du yoga ? Quand je vois toutes ces photos de femmes ou d’hommes, je me demande toujours à quoi ils pensent lorsque la prise de la photo. Car il me semble clair que lorsque l’on prend ces clichés, on est loin d’être dans un mouvement intérieur. Je ne vais pas jeter la pierre, ces photos tout autant que vous, je les trouve belles mais elles ne m’inspirent pas. Parce qu’on revient dans les travers d’une société qui se prétend exemptes de défaut avec des postures idéales et des yogis idéaux.
De plus, celui qui veut commencer le yoga et qui n’a pas forcément confiance en lui, qui ne connait rien, a-t-il envie de pratiquer le yoga lorsqu’il voit ces photos. Souvent les gens se projettent et lorsqu’ils voient ces photos d’asanas, ils n’osent même pas essayer. Pour un peu plus de transparence, il faudrait une légende en-dessous de chaque photo, cela permettrait de remettre les choses à leur place. Genre ”eka pada viparita dandasana”(voir photo), 15 ans de pratique intense, ce serait plus honnête et permettrait aux néophytes de se dire « waouw, il lui a fallu autant de tant pour arriver à faire cette posture, quelle persévérance, quelle volonté ». Cela permettrait de se dire que tout est possible pour celui qui le veut. Au lieu d’entendre à tout va « mais non, le yoga, c’est pas pour moi, je suis pas très souple, j’ai mal au dos, aux épaules, etc…
Puis, il y a tellement de yoga et de corps différents que ces photos extraordinaires, c’est un peu comme la pub à la télé. Un même cliché pour tout le monde. Bon, c’est un peu un coup de gueule cet article, je sais que les mentalités commencent à s’ouvrir, que sur Internet on trouve des vidéos de personnes aux profils différents qui font du yoga. Mais, ce n’est pas une généralité.
Cela amène une réflexion. Comment se positionner sur internet? Est-ce que je me lance dans des photos de postures parfaites ? Non, ce que je veux c’est expliquer, parler de ressenti, de choses du dedans. S’il faut que j’illustre avec des photos, elles seront dans ce sens, des photos d’asanas pour un meilleur ressenti. Car comme tout processus d’apprentissage, c’est en se trompant qu’on apprend. On apprend à utiliser ses os, ses muscles, son ressenti pour bien se placer et si ça ne ressemble pas tout de suite à un asana en soi, ce n’est pas grave.
Pendant ma formation de professeur, on a beaucoup travaillé l’alignement pour développer des asanas parfaits, cela demande beaucoup de pratique, beaucoup de concentration, de discernement, d’explication dans le ressenti du corps en mouvement. Mais était-on vraiment dans l’asana ? Avec un mental complètement absorbé dans le corps. Non, on est toujours dans le cérébral, à penser au sacrum qui doit descendre, au ventre qui remonte. Et c’est ok. Mais ce n’est pas encore l’union du corps, du mental et de l’esprit qui prend place ici. Ce ne sera peut-être pas pour cette vie.
Il faut juste expliquer aux gens, qu’ils n’ont pas besoin de faire des postures parfaites, mais à force de pratique, ils arriveront à développer leur conscience, une certaine connaissance de leur corps. C’est ça l’objectif du yoga. Un peu comme l’artisan bijoutier qui poli une vieille pierre pour un jour réussir à la faire briller de toute sa splendeur.
Le yoga, c’est le mouvement, on ne peut pas figer l’asana. Il est comme le bourgeon d’une fleur qui éclot, il se déploie. Avec la pratique, il s’ouvre à plus de compréhension de soi et du monde. Il est en perpétuelle mutation.
Quand j’ai décidé de commencer la formation et que j’ai demandé à mon professeur si je pouvais me lancer dans l’aventure, il m’a répondu que ma pratique était faible mais que j’avais de la technique, beaucoup de présence et que je pouvais essayer si je le désirais. Après quelques mois de formation, il m’a pris à part avec quelques autres et nous a expliqué que notre pratique était faible et que nous devions travailler. Les autres ont arrêté. Moi, j’ai décidé de continuer. Les trois années ont passé et à chaque examen, j’ai entendu que ma pratique était faible et que je devais pratiquer. Pourtant, c’est ce que je faisais mais j’avais beaucoup d’autres chats à fouetter à côté. Ce que j’ai fait, j’ai pratiqué autant que possible. Non plus pour réussir l’examen, je l’ai juste fait parce que j’avais cet appel pour le yoga, j’avais envie d’apprendre, de comprendre, de me transformer, de transcender ces choses en moi qui me limitaient. Si mes asanas n’étaient pas parfaits et bien soit. Cela n’a pas été facile et m’a demandé de faire des choix. Mais comme la vieille pierre qui a besoin d’être polie, j’ai réussi à faire briller des parties de moi qui m’étaient inconnues et d’asanas en asanas pratiqués durant cette formation intense et ardue, j’ai réussi mon examen en m’entendant dire que j’avais du potentiel.
Tout ça pour se rendre compte que finalement, on n’a pas appris tant que ça. Enfin si, j’ai appris qu’il fallait beaucoup travailler lorsqu’on désire quelque chose. Que le dicton « Rome ne s’est pas construit en un jour » prend tout son sens dans ce contexte. Pour ce qui est du yoga, je me rappellerais toujours de Rita Keller, une professeur de yoga iyengar allemande, qui nous avait dit « il faut 4 vies pour apprendre le yoga ». Restons donc humble, lorsque nous parlons, nous montrons, nous photographions. Car ce n’est que le fragment d’un kaléidoscope bien plus immense que nous ne pouvons l’imaginer.
Et vous? Que pensez-vous de ces images parfaites? Comment résonnent-elles en vous?
Donnez-moi votre avis. Ca m’intéresse vraiment.
Ecrit par Letizia Terrana
Credit photo: Amy


2 commentaires
Sabrina
Merci pour cet article. Moi j’aime assez voir ces positions et cela me donne envie de travailler pour y arriver. Le seul souci est que qu’ il faut effectivrment bcp d’annees avant d’y arriver et que je ne suis pas sure d’avoir la patience…et les cours débutants semblent un peu fade a coté ! Mais il est vrai qu’avec ce type de photos on voit plus le coté acrobatique que l’aspect méditation derriere.
ArmandAmar
Merci pour ton commentaire Sabrina. Je suis d’accord avec toi. Cela prend des années. C’est un travail de fourmi jour après jour. Je pense qu’il vaut mieux ne pas se mettre d’objectif précis et de profiter des bienfaits du yoga au quotidien. Le jour ou le corps est prêt, ça viendra tout seul. Surtout il faut éviter de se blesser et pratiquer avec joie. Tu n’as pas de cours intermédiaire près de chez toi? Ce serait une solution.. Joyeux Noel.